HISTORIQUE DE LA VILLA SANTO SOSPIR
ou le coup de foudre de l'amitié

Jean Cocteau Villa Santo Sopir

Jean Cocteau devant l'entrée de la Villa Santo Sospir © Paul Louis.


En 1949, le poète Jean Cocteau au cours du tournage des Enfants Terribles, film réalisé d’après son célèbre roman par un tout jeune cinéaste de l’époque, Jean Pierre Melville, fit la connaissance de Francine Weisweiller. Nicole Stéphane (de son vrai nom Nicole de Rothschild), l’actrice principale du film, cousine d’Alec Weisweiller, présenta le poète à Francine ; il y eut entre eux un véritable coup de foudre d’amitié.

Au Printemps 1950, après le montage des Enfants Terribles,  Francine invita Jean Cocteau, ainsi que son fils adoptif Edouard Dermit (interprète du rôle de Paul dans le film), à venir passer une petite semaine de vacances dans sa maison de St Jean Cap Ferrat surplombant la baie de Villefranche.

La villa Santo Sospir, construite peu de temps après la guerre, avait été achetée par Alec et Francine en 1946. Utilisée comme maison de vacances, les murs de la villa étaient restés vides. Quelques jours après son arrivée, Jean Cocteau dira : « l’oisiveté me fatigue je m’y dessèche…. ». Il demanda à Francine s'il pouvait dessiner au fusain la tête d’Apollon au-dessus de la cheminée du salon. De fil en aiguille, il tatoua de fresques tous les murs de la maison. Matisse lui avait dit : « Quand on décore un mur on décore les autres, il avait raison ». Cocteau disait également : « Picasso a ouvert et fermé toutes les portes, restait de peindre sur les portes, c’est ce que j’ai essayé de faire.  Mais les portes donnent dans les chambres, les chambres ont des murs et si les portes sont peintes les murs ont l’air vides… »

 

Des fresques a tempera

Tout l’été de 1950, Jean Cocteau a travaillé sur des échelles, sans aucune maquette préalable. Après avoir dessiné au fusain, le poète a rehaussé ses dessins de couleurs : un ouvrier italien lui préparait des poudres de couleur délayées dans du lait cru. C'est ce qu’on appelle des fresques a tempera. Cocteau écrira : « il ne fallait pas habiller les murs, il fallait dessiner sur leur peau, c'est pourquoi j'ai traité les fresques linéairement avec le peu de couleurs qui rehaussent les tatouages. Santo Sospir est une villa tatouée ».

Villa Santo Sopsir crépuscule

La Villa Santo Sospir au crépuscule...

 

Pour la plupart des fresques, Jean Cocteau s’est inspiré de la mythologie grecque, avec également des allusions à la Côte d’Azur : les pêcheurs de Villefranche et leurs filets, l’oursin, la fougasse (le pain niçois)…

Deux ans après avoir terminé les murs de la villa, Jean Cocteau s'attaque aux plafonds. Les trouvant trop blancs, il les colorie au pastel dans des tons très doux.

Il compose ensuite deux mosaïques pour le patio d’entrée : sur le seuil, deux visages et un serpent ; sur le mur à gauche, une tête d’Orphée.

Enfin trois ans après, Jean Cocteau offre à Francine, pour le mur de la salle à manger laissé nu, la tapisserie Judith et Holopherne dont il a exécuté le carton au pastel en 1948 dans sa maison de Milly-la-Forêt.

 

La marque indélébile du poète

Des années durant, Jean Cocteau passera de longs séjours dans la villa de Saint-Jean Cap-Ferrat. A propos de ce lieu, il écrira « Quand je travaillais à Santo Sospir, je devenais moi-même mur et ces murs parlaient à ma place ».

Fresques, mosaïques et tapisserie habillent encore aujourd’hui Santo Sospir, plus vivantes que jamais. Elles épousent non seulement l’architecture de la maison, mais aussi les états d’âme de ses habitants. Le mobilier est également resté le même, si bien que les visiteurs d'aujourd'hui sont plongés dans l'intemporalité du poète.

Peu de temps  après avoir tatoué  la villa Santo Sospir, sur cette même Côte d’Azur, Jean Cocteau décora de fresques la chapelle St Pierre à Villefranche qu’il offrit aux pêcheurs, puis ce fut  la salle des mariages de la mairie de Menton. Il dessina également un théâtre Grec pour le Centre Méditerranéen universitaire du Cap d’Ail et un an avant sa mort, Jean Cocteau exécutera des maquettes pour une autre chapelle à Fréjus « Notre Dame de Jérusalem : Domaine de la Tour de Mare». Ce travail manuel ne l’empêcha pas d’écrire des poèmes, des essais, des romans et de réaliser son dernier film : « le Testament d’Orphée ».

La Villa Santo Sospir est, depuis le 5 mai 1995, inscrite à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

« Picasso, Matisse, Chagall, moi-même, sur cette côte où vivait Renoir, nous avons essayé de vaincre l'esprit de destruction qui domine l'époque, nous avons orné des surfaces que les hommes rêvent de démolir. Peut-être, que l'amour de notre travail les protégera contre les bombes ».

phare Cape Ferrat

Le Cap Ferrat qui, selon une vieille carte marine, se nommait "Saint-Soupir". L'actuel phare, visible depuis la villa,
a été reconstruit au début des années 1950 au début de la "période Cocteau"

 

 

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